Aix-en-Provence
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Der Marquis d'Argens hat bis zu seinem 15. Lebensjahr in seiner Geburtsstadt Aix-en-Provence gelebt, kehrte später häufig dorthin zurück und verbrachte seine letzten Lebensjahre auf dem unweit Aix gelegenen Landsitz seines Bruders in dem Dorf Éguilles. Seine Familie gehörte zu den Notablen der Hauptstadt der Provence, in der sich heute noch Spuren ihres Wirkens finden: das Naturkundliche Museum der Stadt ist in dem von d'Argens' Großvater erbauten Hôtel d'Éguilles untergebracht. Reste des um 1775 im Auftrag Friedrichs des Großen in der Minoritenkirche der Stadt errichteten Grabmals für den Marquis d'Argens werden heute im Aixer Musée Granet aufbewahrt.
Einen lebendigen Eindruck des Gepräges der Stadt kurz nach d'Argens' Tod vermittelt die Beschreibung, die der Schweizer Mathematiker und Astronom Johann Bernoulli (er und d'Argens hatten sich in Berlin kennengelernt und korrespondierten miteinander) gelegentlich eines Besuches im Januar 1775 anfertigte:
<p. 86> Aix en Provence n'est pas une très grande ville; j'en ai fait le tour commodément en 40 minutes; mais elle est très bien bâtie, remplie de beaux hôtels, & le quartier qu'on nomme d' Orbitelle, dans lequel se trouve le Cours, a été justement célébré par plusieurs géographes & voyageurs. Vous ignorés peut-être encore qu'elle reçoit actuellement un nouvel embellissement des plus considérables. Une des belles chaussées qu'on est occupé à faire dans les environs de cette ville & dont toute la Provence auroit grand besoin, va aboutir à une grande place qu'on forme à l'entrée du Cours en abattant un couvent & en élevant le terrain jusqu'à la hauteur de cette promenade ; en sorte qu'on n'y arrivera plus, à l'avenir, de côté, par une vilaine petite rue, mais par une belle porte neuve & une place digne de précéder une si belle promenade. C'est un prodigieux ouvrage d'élever le terrein de cette place future jusqu'à la hauteur du Cours; on n'auroit pu l'entreprendre si on n'avoit pas à employer la terre
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qu'on enleve des collines voisines pour rendre la nouvelle chaussée plus égale.
La ville manque d'eau courante, mais du moins pas d'eau qui coule; ses fontaines sont belles & c'est un grand agrément qu'il y en ait d'eau froide & d'eau chaude; non seulement il est très commode d'avoir de l'eau chaude à toute heure, mais c'est pour les pauvres une grande épargne dans un pays où le bois est si rare qu'on l'achete presque tout au poids, à un très haut prix. La maison des bains d'Aix, où ces eaux chaudes se trouvent en plus grande quantité, est située hors de la ville, mais près d'une des portes; je m'y suis baigné plusieurs fois très agréablement; on se deshabille dans un cabinet qui précède le caveau du bain & qui est d'une température modérée toujours égale, après quoi on descend dans un joli bain de marbre où un robinet fournit la quantité d'eau qu'on désire; elle est toujours chaude. Si on n'aime pas les bains chauds, on peut remplir le caveau quelque tems d'avance pour donner à l'eau le tems de se refroidir; au contraire si étant dans le bain on veut le réchauffer, on ouvre le robinet qui donne l'eau chaude & on en fait écouler autant d'eau refroidie qu'on juge nécessaire par une ouverture qu'on débouche. Le prix d'un de ces bains est fixé à 12 sous ; il
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y en a de moindres pour les pauvres; il seroit à souhaiter que les gens qui prennent soin de cette maison fussent plus serviables & moins disposés à rançonner & à surfaire. Les eaux minérales dont je parle, se prennent aussi en boisson; elles ont été analysées plus d'une fois & je crois encore en dernier lieu par Mr. Darlue, habile Médecin de cette ville, Auteur d'un poème sur l'inoculation & qui travaille à un ouvrage sur l'histoire naturelle de la Provence. Leur goût m'a paru un peu savonneux & sulfureux.
Il n'y a pas de bien grandes ni de nombreuses curiosités à voir dans les églises de la capitale de la Provence: quand on a vu les portes de la cathédrale & surtout les colonnes qui restent d'un temple rond antique, renfermées dans la sacristie de cette églisé (*), le reste se réduit à peu près, à quelques tableaux de Amédée Van loo aux Augustins, & à un tableau de Puget dans je ne sais plus quelle église. En revanche plusieurs particuliers curieux & aisés ont fait des collctions de tableaux, d'estampes & d'autres curiosités qui méritent l' attention du (*) Il y [a] quelques autres restes d'anciens monumens dans les environs d' Aix ; ils sont représentés sur un plan de cette ville trop grand pour que j'eusse v oulu m'en charger. J'ai cherché inutilement un plan d'Aix en petit.
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voyageur (*). J'ai vu chés Mr. Boyer de Fonscolombes des appartemens meublés de cette maniere avec autant de goût que de dépense. Il a d'excellens tableaux François, Italiens & Flamands; par ex. de beaux morceaux du Poussin; un du Schidone, & surtout un beau tableau d'un des Carraches; une belle tête par Puget; un tableau de Vernet dans le goût de Salvator Rose; trois de Vandyck; un de Holbein; d'autres de Teniers, de Poelenburg, de Breughel, de Berghem &c. de belles fleurs de Me. Angelica Kaufmann. Mr. de Fonscolombes possede aussi de beaux morceaux de sculpture de Clodion & d'autres; des tables de marbre peint & d'autres meubles d'un goût ou exquis ou recherché; des bronzes antiques & modernes, des çamées, des porcelaines &c. enfin une bibliothèque choisie qui assortit parfaitement avec tout le reste.
J'ai vu encore de bien bons tableaux, entr'autres de Rembrand & de Vandyck, chés Mr. de Monvallon , Conseiller au Parlement, & des estampes soit très belles soit rares chés Mr
(*) La crise parlementaire singuliere pendant laquelle je me suis trouvé à Aix & dont je parle plus bas, m'a empêché plus que toute autre chose de voir beaucoup de ces collections; mais on trouvera du moins dans une Addi tion quelques renseignemens sur celles que je n'ai pas vues.
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l'Abbé de Meronay (*) ou plutôt chés son frere qui porte un autre nom & qui est Conseiller au parlement.
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Revenons à Aix : cette ville avec toute sa Noblesse & avec son parlement ne tient que le second rang & d'assés loin après Marseille qui est véritablement la capitale; c'est à Marseille seulement qu'il y a une troupe de Comédiens à demeure: elle vient jouer à Aix deux fois par semaine les jours qu'il y a concert à Marseille; il y a aussi un concert à Aix une fois par semaine; il est assés bien rempli, mais la salle n'approche pas pour la beauté de celle de Marseille.
On dit que quelquefois cependant les bonnes maisons d'Aix font preuve de magnificence & d'hospitalité, mais je n'ai pas été dans cette ville dans un tems favorable pour en juger; il y avoit justement une forte crise occasionnée par le rétablissement de l'ancien parlement; les membres du nouveau qui alloit s'éteindre & leurs amis étoient dans la consternation. Déjà auparavant il régnoit une grande inimitié entre les familles de l'ancien parlement & du nouveau, & la rentrée triomphante du premier ne peut avoir fait revivre que lentement la sociabilité, les assemblées & les divertissemens. Pour n'avoir pas été réduit entierement par cette position des affaires au personnage d'un spectateur à réflexions, j'ai attendu du moins encore la solennité de la restauration de l'ancien parle-
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ment; j'ai vu la veille tirer force pétards pour complimenter plusieurs des exilés sur leur retour, à mesure que quelqu'un d'eux rentroit en ville; j'ai entendu donner la sérénade aux Présidens; j'ai vu le lendemain la ville fourmiller de Marseillois arrivés dans trois ou quatre mille chaises, & qui venoient s'amuser de la fête, & moi même j'ai suivi avec un véritable plaisir la procession de la Basoche, dont tous les membres & particulièrement ceux qu'on nomme les bâtonniers, étoient habillés tout à fait élégamment, ceux-ci de tafetas blanc, les autres en couleur. Je ne vous dis rien des principaux personnages de la fête, de la procession & des habits de cérémonie de M. le Ms. de Rochechouart député du Roi, de l'Archevêque d'Aix, de plusieurs Évêques suivis des magistrats à rétablir; vous savés que dans des occasions
pareilles tout fait spectacle. La Maréchaussée même endimanchée, avec ses fifres & ses tambours, étoit belle à voir. Les caisses des instrumens de ces derniers sont fort longues & d'une forme agréable.
Lettres sur différens sujets, écrites pendant le cours d'un voyage par l'Allemagne, la Suisse, la France méridionale et l'Italie; en 1774 et 1775. Avec des additions & des notes plus nouvelles, concernant l'histoire naturelle, les beaux arts, l'Astronomie, & d'autres matières. Par Mr. Jean Bernoulli, des Académies des Sciences de Berlin, de Pétersbourg, de Stockholm, de Bologne, de Lyon, & de Marseille; de la Société pour l'encouragement des arts, de Londres ; de celle des Physiciens de Bâle, de l'Académie des Arcades de Rome, Tome II, Chés G. J. Decker, Imprimeur du Roi. 1777, p. 86-94. |